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Des enfants à la recherche du trésor |
En cette période où le chômage fait rage dans le pays, nombreux sont ceux qui s’adonnent à n’importe quelle activité pour gagner de l’argent. A Thiaroye, non loin du bureau de la Poste, des jeunes viennent fouiller le sol à la recherche de la ferraille dans un terrain naguère occupé par des mécaniciens. Reportage.
« Un trésor est caché dedans. Je ne sais pas l'endroit mais un peu de courage vous le fera trouver. (…) Creusez, fouillez, bêchez. Ne laissez nulle place où la main ne passe et repasse », disait un riche laboureur sentant sa mort prochaine à ses enfants dans Les fables de La Fontaine. Aujourd’hui, beaucoup de jeunes au chômage creusent, fouillent et bêchent la terre pour trouver un trésor qui n’est rien d’autre que de « la ferraille ».
Sur l’axe qui mène au camp Thiaroye, se situe à droite un vaste espace. Dans le passé, bon nombre de garages mécaniques étaient implantés sur ce lieu. Ce site a été aménagé pour les besoins du tronçon de l’autoroute à péage Dakar-Diamniadio. Ici, tout est détruit. C’est le vide total. Sur place, on n’aperçoit que des jeunes en train de bêcher. Certains, assis à même le sol, se livrent à « leur activité principale ».
Ce terrain, aujourd’hui nu, accueille des jeunes et rarement des adultes. La plupart sont des Thiaroyois à la recherche de la ferraille. Chose surprenante ! « Dès le matin, les lieux sont déjà remplis de monde », nous signale un jeune. À l'aide de pelles, de longs bâtons ou de bêches, ils remuent le sol. « Nous sommes à la recherche de la ferraille », dit Ibrahima Bâ qui est pourtant un mécanicien de formation. Cela montre que ce ne sont pas seulement des chômeurs qui fréquentent ce terrain. « Je viens ici lorsqu’il n’y a pas de boulot dans notre atelier. La vie est devenue très dure et il faut que je me débrouille pour gagner quelque chose », justifie-t-il.
Ces « laboureurs » peuvent obtenir dans la journée plusieurs kilogrammes de « fer » qu’ils revendront. « Il arrive que je récupère en un seul jour plus de 30 kilos », précise un jeune en plein travail, le front couvert de poussière et de sueur. Le kilo de ferraille se vend à 100 F CFA. Non loin de ces adolescents, un quinquagénaire, père de six enfants, est aussi en train de chercher ce métal "précieux" à ses yeux. Sous le sceau de l’anonymat, il confie: « au lieu d’aller quémander, je préfère me débrouiller pour gagner ma vie et subvenir aux charges de ma pauvre famille ». Même si ses revenus sont insuffisants, ce père de famille ne compte pas abandonner cette activité. « Comme je n’ai pas de boulot, je suis obligé de fréquenter ce lieu », avance t-il.
Même les plus jeunes ne sont pas en reste car ce site est aussi fréquenté par des gamins qui sont, pour la plupart des talibés ou des élèves. Sur place, armé d’un fer, D. F., élève en classe de CE1 à l’école Martyrs B de Thiaroye, s'adonne avec force à la fouille du sol. « Je ne viens ici que le week-end », explique t-il. A ses côtés, des talibés sont aussi à la manœuvre. Les pots avec lesquels il demandent l’aumône sont abandonnés tout près. Gagner de l'argent à la sueur de son front semble être le mot d’ordre de ces enfants, qui n'ont pas voulu répondre à nos questions.
La vie dure se fait de plus en plus sentir dans ce pays. A longueur de journée, c’est une cinquantaine de jeunes qui fréquentent ce site de Thiaroye. La plupart ne travaillent pas et doivent faire face aux difficultés de la vie. Fouiller ce sol, trouver de la ferraille et la revendre constitue une alternative au vol et à la délinquance.
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